Etats-Unis - 2012
Réalisateur
: William Friedkin
Acteurs
: Matthew McConaughey, Emile Hirsch, Juno Temple, Thomas Haden
Church, Gina Gershon
Musique
: Tyler Bates
Durée
: 102 minutes
Distributeur
: Pyramide Distribution
Date
de sortie : 5 septembre 2012
Chris, un jeune dealer, doit trouver 6000 dollars sous peine de se faire trouer la peau. Une idée lui vient : celle de tuer son affreuse mère pour toucher son assurance vie de 50 000 dollars. Il fait part de cette idée à son père, qui s'est remarié depuis, et fait appel à Killer Joe Cooper, un flic, tueur à ses heures perdues...
Killer Joe marque le grand retour de William Friedkin derrière la caméra, cinq ans après l'incroyable Bug. On lui doit notamment des monuments tels que French Connection, L'exorciste, le convoi de la peur ou encore Police Fédérale Los Angeles. Bref, des films ayant marqué l'inconscient de nombreux cinéphiles de manière indélébile. Friedkin faisait partie, avec Coppola, Scorcese ou encore Spielberg, de ce qu'on appelle "Le Nouvel Hollywood", période où le cinéma était synonyme de liberté artistique totale. A cette époque, s'en était fini des trames classiques, des bons sentiments et des happy ends. Ce que ces cinéastes voulaient, c'était de l'authenticité, du réalisme (ce n'est pas pour rien que Friedkin vient du documentaire).
Si certains se sont assagis avec le temps, ce n'est absolument pas le cas de Willy le dingue (surnom qu'on lui donnait dans les années 70 à cause de ses accès de colères impressionnants sur les tournages de ses films). Friedkin n'a jamais cherché à brosser le spectateur dans le sens du poil durant toute sa carrière. Ses films sont en général d'une grande noirceur, les personnages qu'il dépeint sont toujours moralement ambigus et on ne distingue parfois plus le bien du mal.
Killer Joe prouve une fois de plus que le cinéaste, à pourtant 77 ans, n'a pas mis d'eau dans son vin. En signant l'adaptation d'une pièce de théâtre de Tracy Letts (celui-ci est déjà l'auteur de la pièce qui a inspiré le précédent film du cinéaste, bug), Friedkin nous assène une mandale cinématographique en pleine gueule. Il continue à dépeindre des personnages amoraux, prisonniers de leur misérable condition et prêts à tout, quitte à buter un membre de leur famille, pour pouvoir empocher une somme coquette qui, une fois partagée entre le tueur et ceux qui l'on engagé, s'avère bien ridicule. Et le réalisateur de regarder impitoyablement les protagonistes de son histoire s'enfoncer dans une merde noire.
L'autre point fort du film, c'est son aspect surréaliste. Non pas que le film soit fantastique, mais il possède une atmosphère, par certains aspects, onirique. Preuve en est avec cette scène d'introduction sous une pluie battante et un orage tonitruant, donnant une impression étrange. La scène en question traduit, en un sens, les tourments des personnages et annonce la folie qui va contaminer tout le long métrage jusqu'à culminer dans un huis-clos étouffant et violent, qui restera à coup sur dans les mémoires.
Pour ce qui est du casting, rien à dire. Le rôle d'Emile Hirsch est aux antipodes de celui d'Into the wild, Juno Temple (Mr Nobody) est une actrice vraiment talentueuse et n'hésite pas à prendre des risques, Gina Gershon (Bound) est géniale en MILF vénale et Thomas Haden Church (Spiderman 3) en impose en redneck dépassé par les évènements. Mais la palme revient sans conteste à Matthew McConaughey (La défense Lincoln), qui incarne un Killer Joe proprement terrifiant. Rompant définitivement avec son image de beau gosse habitué aux bluettes, l'acteur livre une prestation toute en perversité, brutalité et raffinement. Sans doute à l'image d'un cinéaste n'hésitant pas à parler, non sans humour, de ses congénères avec toute la violence et la crudité qu'on lui connait. Friedkin is back !




